Vendredi, 12
janvier 2001
Un amant
impitoyable Le
motard québécois Patrick Trahan n'a pas eu de
chance Anne-Marie Lefebvre,
collaboration spéciale La Presse
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Inconsolable,
Patrick Trahan a dû abandonner en raison d'ennuis
mécaniques. |
«L'amour est
sans pitié», chante Jean Leloup. Celui du «Dakar» ne fait pas
exception. Ses concurrents, pros ou amateurs, se lancent dans
l'aventure avec passion. Mais il semble que l'objet vénéré
soit capricieux. Qui ose le courtiser peut à tout moment être
remercié. Un jour, vous êtes roi. Le lendemain, vous êtes
viré. Le Paris-Dakar est
un amant impitoyable.
Pour la plupart
des concurrents, l'objectif c'est de terminer. Peu importe la
classement, il faut se rendre à destination. C'est le cas des
«blaireaux», ces pères de familles qui roulent en groupe.
Passer à travers le désert et arriver à Dakar est leur seul
objectif.
Avant même
d'avoir franchi le tiers du parcours, plusieurs pilotes ont
abandonné: cinq coureurs en auto, deux en camion et 17 en
moto, en raison de blessures ou d'ennuis mécaniques. Patrick
Trahan, unique concurrent québécois, est du lot. Son moteur
n'a pas tenu le coup. Il a fallu appeler l'assistance
mécanique, une démarche qui ne pardonne pas. Un deuxième
échec. l'an passé,un bris mécanique l'avait contraint à
l'abandon dès la première étape.
Thierry Sabine,
fondateur du Paris-Dakar, mort
dans un accident d'hélicoptère au Paris-Dakar 1986,
disait : «Un Dakar, ça se mérite.» Les concurrents doivent
faire preuve de beaucoup d'endurance, car les étapes sont
souvent longues et ardues. À cela, s'ajoute l'entretien
mécanique. Comme la plupart des amateurs, tous les soirs avant
d'aller se coucher, Patrick a dû rafistoler sa moto dans le
vent et le froid, fatigué, affamé, sans avoir pu prendre une
douche ni même monter sa tente. La veille de sa mise hors
course il disait: «Si je reviens l'an prochain, c'est sûr que
c'est avec mon assistance mécanique. Je suis pilote, pas
mécanicien!»
La chance entre
aussi en ligne de compte. «Parfois, tu fais tout et pourtant
c'est l'échec», explique Raymond Loizeau, un policier
parisien, qui a participé à 20 rallyes-raids, dans la
catégorie des pros. Ce qui ne l'a pas empêché d'abandonner à
sept occasions. Une année, il s'est carrément endormi au
volant. Blessé, il a dû être rapatrié au pays. Mais il est
retourné l'année suivante. «Pour faire un Dakar, il faut être
très déterminé, insister et ne pas se résigner»,
dit-il. |